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Vers une codification du lobbying des ONG

Emergence d’une expertise en lobbying

Date of the document : février 2006

By Hélène Nieul

Les ouvrages, guides et manuels techniques et pratiques sur le lobbying se multiplient. Cette fiche tente de mettre en lumière les mécanismes par lesquels le lobbying tend à être codifié et peu à peu défini comme une technique spécifique, tant au sein des ONG qui le pratiquent qu’au sein des organisations internationales qui tentent de l’encadrer.

Depuis une dizaine d’années, certaines organisations non gouvernementales françaises ont développé le lobbying comme activité à part entière. Il ne s’agit pas d’entrer ici dans le détail des motivations qui poussent ces organisations à faire de la prise de parole un élément de plus en plus prégnant de leur répertoire d’action, sur la scène nationale et internationale. Cependant, il est possible de constater quelques uns des épiphénomènes ayant accompagné ces dernières années le développement de la « défense de cause » comme activité à part entière de ces organisations, et qui constituent la toile de fond de cette réflexion.

En premier lieu, le « lobbying » , plus souvent désigné comme une activité de « défense de cause » ou « d’influence » au sein des ONG, est au cœur du processus de professionnalisation tel que les ONG le produisent, le perçoivent et le désignent. En effet, « l’influence » , sous ses différentes formes et désignations, apparaît de plus en plus comme une activité suffisamment technique pour exiger des compétences spécifiques. Le recrutement de « professionnels » du lobbying est donc l’un des premiers éléments qui ressort de l’observation de cette activité au sein des ONG lors de ces dix dernières années. Il serait donc possible d’étudier les modes de circulation du personnel et des compétences dans ce domaine.

Mais au-delà de la circulation des personnes et de leurs compétences, on peut associer la professionnalisation du lobbying au sein des ONG à la perception et à la désignation de cette activité en tant que « technique » spécifique, voire en tant « qu’expertise » . Ce présupposé qu’il existe un savoir particulier nécessaire à la pratique efficace, ou du moins « dans les règles de l’art » , du lobbying, constitue en soi un objet possible d’analyse. L’existence supposée de ces savoirs suggère également l’existence de modes de circulation, de partage, de diffusion et/ou de rétention de ces savoirs. Aussi les sources de ces savoirs et leurs modes de formalisation constituent-ils une clé d’entrée possible pour saisir les représentations du lobbying en tant que technique appelant à une codification, tant au sein des ONG que parmi leurs interlocuteurs.

Cette fiche prend pour point de départ les sources d’une littérature particulière, faite de « guides » , de manuels et de « méthodes » de lobbying. La caractérisation des sources de cette littérature, et son existence même, devraient permettre une approche des mécanismes par lesquels une action est perçue, voire « fixée » et codifiée comme technique par les acteurs qui « l’agissent » et en deviennent ainsi les « praticiens » .

Identification des sources d’une littérature technique du lobbying

En se penchant sur la littérature nombreuse qui contribue à la formalisation du lobbying comme « technique » , il est possible d’identifier trois sources bibliographiques principales.

La première source identifiée, par le nombre d’ouvrages qu’elle génère, est celle que l’on pourrait qualifier de « monde de l’entreprise » . Une bibliographie des ouvrages sur lesquels porte cette fiche, et identifiés comme issus de cette source, se trouve en annexe. Ces ouvrages se présentent pour la plupart comme de véritables « manuels » à destination des dirigeants d’organisations. Leurs titres révèlent souvent d’eux-mêmes cette vocation : « Lobbying, les règles du jeu » , « Le lobbying et ses secrets » , La communication d’influence : lobbying mode d’emploi » etc.1 Les parcours professionnels des auteurs de ces ouvrages sont relativement homogènes. Il s’agit généralement de « lobbyistes » issus du monde de l’entreprise et ayant, pour la plupart, créé par la suite leur propre agence spécialisée. Cette littérature est plus particulièrement issue d’une nébuleuse d’acteurs privés gravitant autour de la Commission Européenne, et beaucoup de ces ouvrages portent spécifiquement sur les techniques de lobbying à mettre en œuvre auprès des institutions européennes. Notons que cette littérature s’adresse à des publics issus largement du monde de l’entreprise, mais aussi de plus en plus explicitement aux ONG. Ainsi, la plupart des ouvrages de ce type publiés ces dix dernières années 2 comportent au moins un chapitre dédié au cas d’un lobbying mené par une ou plusieurs ONG. La structure de ces ouvrages est elle aussi assez homogène. Dans la plupart des cas, une première partie de l’ouvrage propose une présentation large du lobbying comme « outil » . Dans un second temps, ces ouvrages, ou « manuels » , proposent des études de cas et soulignent des « techniques » présentées comme particulières au lobbying. Enfin, il est fréquent qu’une dernière partie signale l’existence d’agences spécialisées auprès desquelles il est possible d’externaliser le lobbying d’une entreprise ou d’une organisation.

La seconde source qu’il est possible d’identifier est quantitativement beaucoup moins fournie, et peu accessible, mais nous intéresse particulièrement dans le cadre de cette fiche, puisqu’il s’agit des ONG. Les textes produits sur le lobbying par les ONG sont la plupart du temps présentés sous forme de notes méthodologiques, de « working papers » à usage interne 3 . Notons que Coordination SUD a organisé en 2000 un congrès intitulé « Aider les ONG à se positionner sur les enjeux internationaux : quelles méthodes d’action, quelles stratégies d’influence ?  » 4. Le compte-rendu de ce congrès, disponible sur Internet , prend une forme singulièrement proche de celle des ouvrages évoqués plus haut : une première partie décrit les intérêts du lobbying et ses différentes phases ; une seconde partie présente différentes expériences en tentant d’en tirer des enseignements méthodologiques ; une dernière partie évoque les différents réseaux et arènes permettant un lobbying collectif, ce qui peut être interprété dans une certaine mesure comme une autre forme d’externalisation du lobbying pour certaines organisations. Ces sources, par leur faiblesse numérique et leur non publication, peuvent sembler marginales. Néanmoins, elles indiquent un souci de systématisation des méthodes employées, de réappropriation et de redéfinition d’une méthode issue d’un autre secteur, d’apprentissage et de capitalisation d’une matière identifiée comme savoir spécifique. Par ailleurs, notons que certaines ONG ayant particulièrement développé les activités de plaidoyer publient des ouvrages retraçant leurs succès. On peut par exemple noter les ouvrages publiés par Handicap International sur la campagne pour l’interdiction des mines anti-personnel. Au-delà d’une mise en discours et de la consolidation de la « geste » de l’organisation, ces ouvrages laissent une large place à la présentation des méthodes et techniques employées 5.

La troisième source identifiée comme produisant une « méthodologie » du lobbying est celle des organisations internationales. Certaines de ces publications sont uniquement destinées au personnel de ces organisations. Ainsi la Banque Mondiale a publié un « guide » 6 sur les méthodes de « consultation des organisations de la société civile » à destination de son personnel. Le souci d’élaboration d’une méthodologie et d’encadrement de cette consultation est explicite. De façon plus surprenante, l’ONU a publié en 2003 un guide à destination des ONG sur les modes de prise de décision au sein du système des Nations Unies et sur les méthodes de participation des ONG 7 . Cette publication peut sembler anecdotique et isolée. Pourtant, son contenu révèle une posture particulière de l’ONU vis-à-vis d’un public d’ONG de plus en plus diversifié ne disposant pas toujours des clés de compréhension et des codes « appropriés » . Le niveau de détail extrêmement précis de certains des conseils prodigués aux ONG peut être lu comme une tentative « d’égalisation » et d’homogénéisation d’un public d’ONG très hétérogène.

"Bring copies of position papers, in multiple UN languages if possible ; materials about the organization ; business cards ; extra letterhead [...]. Bringing electronic equipment, such as a mobile phone or portable laptop and printer, may also prove to be useful."

Enfin, il existe des « cas mixtes » , la catégorisation des sources proposée ici n’ayant de pertinence que pour ses objectifs propres. Certains ouvrages connaissent en effet des trajectoires singulières, à l’image du guide « How to Lobby at Intergovernmental Meetings » de Felix Dodds, directeur du Stakeholder Forum for Our Common Future 8. Ce livre, écrit par un dirigeant d’ONG et destiné à d’autres dirigeants d’ONG, est distribué entre autres par la librairie de la Banque Mondiale.

Si ces ouvrages et leurs sources peuvent sembler hétérogènes, on peut cependant constater un souci de définition, de formalisation des méthodes et de codification du lobbying commun à des acteurs variés. Sur la base de quelques éléments de définition de ce qu’est ou n’est pas le lobbying, nous tenterons donc d’identifier quelques uns des éléments de contexte susceptibles d’expliquer cette dynamique de codification du lobbying comme technique, voire comme expertise, au sein des ONG et des Organisations Internationales.

Eléments de définition du lobbying

Acception commune

En tant que pratique, il est communément admis que le lobbying « n’est pas » une participation formelle à une négociation. On peut d’ailleurs relier à cette définition de ce que le lobbying « n’est pas » la connotation négative qui lui est attribuée, particulièrement dans le contexte français. En effet, cette pratique, quasi institutionnalisée aux Etats-Unis, est particulièrement associée aux groupes d’intérêts et à une forme d’interférence, voire de « perturbation » des décisions publiques en dehors des circuits de représentation traditionnels. Or en France, la notion de groupe d’intérêt renvoie à l’intérêt particulier par opposition à l’intérêt général sur lequel se fonde en partie le régime républicain. Corporatisme, groupes d’intérêt et lobbying sont donc étroitement liés dans les représentations communes et sont souvent connotés négativement, identifiés comme contraires aux principes républicains, voire contraires aux principes démocratiques.

Définition par les ONG et les organisations internationales

Aussi au sein des ONG françaises est-il assez rare de voir des pratiques de lobbying désignées comme telles. En tant qu’activité, le lobbying est plus souvent désigné comme l’outil d’un « plaidoyer » , d’une « stratégie d’influence » , ou, de manière significative, rattaché à un service de « partenariats institutionnels » . Les modes de désignation de ces pratiques par les ONG françaises sont en soi en partie révélateurs du rapport que ces organisations entretiennent avec ces activités, dans un contexte d’insertion institutionnelle et de rapport aux institutions publiques particulier.

Par ailleurs, au sein des organisations internationales, le terme de « lobbying » est peu employé au sujet des ONG, dans la mesure où il renvoie à un mode informel de prise de parole, tandis que ces organisations tentent au contraire de définir des « cadres de participation  de la « société civile».

Définition méthodologique

De manière exogène, et pour mieux cerner l’objet de cette note, nous pourrions considérer comme définition a minima que le « degré zéro » du lobbying d’une ONG est une prise de parole informelle auprès d’un interlocuteur publique, ayant été identifié comme rouage des processus décisionnels en lien avec les autres activités de l’ONG en question et/ou son objet social. Cette définition a minima du lobbying en tant qu’activité intègre donc le lobbying associé à la « défense de cause » , lié directement à l’objet social de l’ONG, comme le lobbying « procédurier » 9 , visant à modifier les cadres de dialogue entre une ONG et ses interlocuteurs publiques.

Contexte d’une codification du lobbying comme « expertise » parmi les ONG.

Dans le cadre local, voire national, ces interventions informelles auprès d’institutions publiques peuvent se faire par le biais de connections interindividuelles. Il est en effet fréquent que les trajectoires individuelles et/ou professionnelles amènent les personnels des ONG et des administrations auxquelles elles s’adressent à se connaître et à établir des réseaux aussi informels que réels. L’existence de ces réseaux constitue en quelque sorte une pré-condition à l’exercice d’une pratique de lobbying, que celle-ci soit désignée comme telle ou non. Notons ici que le caractère clivé des institutions peut presque être considéré comme une « condition » d’exercice de toute activité de lobbying. La non prise en compte des clivages intra-institutionnels renverrait à un mode de dialogue entre ONG et institution beaucoup plus formel et encadré, n’entrant plus dans la définition du lobbying retenue ici.

On constate par ailleurs que les « tickets d’entrée » auprès de certains échelons des administrations publiques requièrent, au-delà des réseaux interpersonnels, une connaissance fine des circuits administratifs, et a fortiori décisionnels au sein de ces administrations. Plus l’administration est centrale et éloignée, plus ces circuits semblent complexes et denses aux acteurs n’y ayant pas d’accès formel. Cette complexification des réseaux et des savoirs à mobiliser semble se faire plus particulièrement suivant deux vecteurs : la « montée en généralité » et la « montée à l’international » des administrations auxquelles une ONG s’adresse. Il est peut-être d’ailleurs possible d’établir un parallèle, intuitif à ce stade, entre la professionnalisation des activités de lobbying au sein de certaines ONG et la montée en généralité et/ou à l’international de ces ONG 10. Cette professionnalisation se traduit par la formalisation des pratiques de lobbying, à travers la construction d’une forme d’expertise au sein de l’ONG, la circulation de cette expertise entre ONG, et la création de nouvelles catégories lui correspondant. C’est à cette construction d’expertise que semblent correspondre les travaux sur le lobbying issus des ONG et de leurs plates-formes, évoqués plus haut 11.

Contexte d’une codification du lobbying comme « technique » au sein des organisations internationales.

Au-delà de la perception endogène que les ONG peuvent avoir d’une partie de leurs activités, auxquelles elles associent ou non le vocable de « lobbying » , il est utile de se pencher sur les institutions auprès desquelles, ou au sein desquelles, ces activités sont mises en œuvre. Nous nous pencherons ici plus particulièrement sur certaines organisations internationales, qui entretiennent historiquement, pour certaines d’entre elles, des relations particulières avec les ONG. L’ONU, à travers le Conseil Economique et Social (ECOSOC) ou plus spécifiquement certaines de ses agences comme par exemple l’UNESCO ou l’OIT, ont en effet vu dans le développement d’alliances avec les ONG durant la Guerre Froide une possibilité de relégitimation de leur rôle sur la scène internationale, les clivages interétatiques rendant par ailleurs difficile, voire impossible, le fonctionnement intergouvernemental de ces organisations. Aussi au sein de certaines de ces organisations a-t-on vu se développer une institutionnalisation de la participation des ONG.

A titre d’exemple, et sans vouloir ici entrer dans les détails procéduraux, l’article 71 de la Charte des Nations Unies donne un rôle consultatif aux ONG (« Le Conseil Economique et Social peut prendre toutes dispositions utiles pour consulter les organisations non-gouvernementales qui s’occupent de questions relevant de sa compétence » .). Ce statut concerne aujourd’hui environ 400 ONG. Certaines institutions spécialisées ont prévu un mécanisme similaire dans leurs statuts (OIT, UNESCO), ainsi que certaines organisations régionales comme l’Union Européenne.

Dans le cas de l’ONU, les critères d’accréditation des ONG sont relativement opaques, étant donné le caractère extrêmement large et peu discriminant des conditions à remplir pour qu’une ONG puisse faire acte de candidature. Seules les ONG des catégories 1 et 2 (sur trois catégories définies par l’ECOSOC) peuvent déléguer des observateurs aux séances publiques du Conseil et de ses organes, y prendre la parole, leur adresser des exposés écrits, bénéficier de la documentation qui y est distribuée. Dans la pratique, les ONG ont également accès à l’Assemblée Générale des Nations Unies et à ses commissions, mais ne peuvent y faire aucune déclaration écrite ou orale. Par ailleurs, on estime à 1600 le nombre d’ONG associées à la section des organisations non gouvernementales du Département de l’Information des Nations Unies (DPI). De fait, le développement d’une participation formelle ouverte à un grand nombre d’ONG, mais réduite en substance, génère dans certains organes des organisations internationales un double « appel d’air »  : d’une part, les ONG accréditées pour participer à un ECOSOC n’ayant que peu de pouvoir décisionnel aspirent à une prise de parole au sein ou aux abords d’instances décisionnelles plus importantes, tendant ainsi à contourner les tentatives d’encadrement de leur participation par les organisations internationales. D’autre part, des ONG de faible surface ayant une audience réduite au niveau national ont accès, par le mécanisme d’accréditation de l’ONU, à certains espaces de consultation formelle, mais aussi aux couloires et aux coulisses des organisations internationales, et par ce biais aux représentants des Etats, sans détenir pour autant les réseaux, les savoirs et les éléments de « codes » 12 implicites qui réunissent de manière générale les lobbyistes et leurs interlocuteurs au sein de ces institutions. Dans le cas de l’ONU, il semble donc que l’indétermination des critères permettant une prise de parole formelle soit l’un des moteurs dans la constitution par les ONG d’espaces de prise de parole plus informels.

Un phénomène inverse semble produire des effets néanmoins très proches au sein d’une institution comme l’OMC. Celle-ci prévoit que "le Conseil Général pourra conclure des arrangements appropriés aux fins de consultation et de coopération avec les organisations non gouvernementales s’occupant des questions en rapport avec celles que l’OMC traite". Les modalités de cette consultation établissent des critères de sélection des "ONG partenaires" beaucoup plus stricts que ceux très flous définis par l’ONU. Ici il semble, entre autres facteurs, que ce soit le caractère très sélectif du mode de consultation des ONG qui génère une forme d’appel d’air vers des formes de prises de parole plus informelles au sein de cette organisation. Ainsi lors des réunions de l’OMC, les représentants d’ONG travaillent pour la plupart en dehors des circuits institutionnalisés de participation et « s’organisent » sur les paliers, lors des entrées et sorties des représentants des Etats dans les différentes sessions officielles, ou en marge du lieu de réunion officiel.

L’exemple de l’ONU comme celui de l’OMC tendent à suggérer que certaines institutions internationales se sont vues en quelque sorte « débordées » par un public d’ONG à la fois de plus en plus nombreux et de plus en plus hétérogène en termes de personnel, de ressources et d’expériences. Ceci permet de dresser au moins partiellement le contexte dans lequel ces mêmes organisations internationales tentent de formaliser et de codifier les pratiques de lobbying des ONG, notamment par le biais des publications évoquées plus haut.

Conclusion

Tant parmi les ONG qu’au sein des organisations internationales, il existe donc des éléments de contexte qui appellent à une formalisation du lobbying en tant que technique codifiée, voire en tant qu’expertise. Il semble donc que l’on puisse identifier une double dynamique, paradoxale à certains égards. Le mouvement identifié ici comme construction d’une « expertise en lobbying » parmi les ONG peut être interprété comme la construction d’une « expertise de l’informel » , si nous nous en tenons à la définition du lobbying proposée plus haut. De la même façon, les efforts de codification du lobbying dont font preuve certaines organisations internationales, tentant d’établir une sorte de « protocole du lobbying » , peuvent apparaître comme des tentatives de « formalisation de l’informel » . Peut être est-il possible de voir en ces paradoxes apparents les tentatives de réduction de l’écart existant entre, d’une part, le répertoire d’action de certaines ONG auprès des organisations internationales, et d’autre part les « bonnes pratiques » telles que ces organisations internationales tentent de les définir. La notion de répertoire d’action implique que le cadre institutionnel ne se limite pas à constituer un réceptacle des pratiques des acteurs, mais opère une sorte de modelage implicite de ces pratiques. Or il semble que, dans le cas du lobbying, ce « modelage implicite » cède de plus en plus le pas à une démarche explicite de codification. Ainsi formalisé, le lobbying perdrait donc peu à peu de sa particularité en tant que stratégie de contournement, pourtant à l’origine de son développement au sein de certaines ONG.

Références bibliographiques

Bibliographie des ouvrages sur lesquels porte une partie de cette fiche, outre les documents référencés en notes :

F. Autret, Les manipulateurs, le pouvoir des lobbys, Denoël Impacts, 2003.

M. Clamen, Le lobbying et ses secrets : guide des techniques d’influence, Dunod, 2000.

M. Clamen, Manuel de lobbying, Dunod, 2005.

M. Clamen, Pratique du lobbying, Dunod, 2002.

J-C. Ducatte, La gestion de l’influence, Liaisons, 1998.

B. Gosselin, Le dictionnaire du lobbying, Ed. Management et Société, 2003.

O. Le Picard, N. Bouvier, J-C. Adler, Lobbying, les règles du jeu, Ed. Organisation, 2000.

D. Prevost, Le lobbying ou l’échiquier des pouvoirs, Ed. Liaisons, 1995.

P. Romagni, La communication d’influence : lobbying, mode d’emploi, Presses du Management, 1995.

Notes :

1 Voir références bibliographiques en fin de fiche.

2 La bibliographie utilisée pour cette fiche se limite à des ouvrages publiés après 1995

3 La présente note se limite à des sources publiques. Des études de cas plus approfondies permettraient une étude plus précise de cette source bibliographique.

4 Les sites de Coordination SUD et de CONCORD sont ceux sur lesquels ce type de documents est public. La publication de ces notes méthodologiques par des plates-formes d’ONG, fédérations et confédérations pourrait constituer en soi un élément d’analyse, dans la mesure où il s’agit d’une forme d’externalisation des stratégies de prise de parole par les ONG auprès de certaines institutions. On retiendra à ce sujet la note de CONCORD, "Etude sur l’efficacité de l’influence politique au niveau européen des ONG de développement", disponible sur le site de CONCORD.

5 Voir à ce sujet Handicap International, Mines anti-personnel : la guerre en temps de paix, in Publications du GRIP, septembre 1996, n°213 ; et Handicap International, Les mines anti-personnel aujourd’hui : synthèse du rapport 1999 "Pour une terre sans mines", Ed. l’Esprti Frappeur, Paris, 1999.

6 "Consultation with civil society, a sourcebook", Working Paper, may 2004.

7 Intergovernmental Negociations and Decision Making at the United Nations, the NGLS Guide for NGOs, UN Non Governmental Liaison Service, June 2003.

8 How to lobby at Intergovernmental Meetings, Felix Dodds, with Michael Strauss, Earthcan, London, 2004.

9 Sur la distinction entre "influence substantielle" et "influence procédurière", voir Fougier Eddy, L’influence des mouvements contestataires, Colloque GERMM Les mobilisations altermondialistes, 3-5 décembre 2003.

10 Ces éléments peuvent également être mis en lien avec l’émergence et le renforcement de plates-formes d’ONG prenant en charge une partie du lobbying à l’échelle nationale, voire régionale à l’image de CONCORD en Europe.

11 On peut également noter que l’émergence de programmes de formation continue spécialisés peut constituer un autre signe de la construction de cette expertise.

12 Ici la notion de code peut même être entendue au sens de "code de bonne conduite", voire au sens de "code protocolaire". Elle peut aussi être entendue dans sa dimension linguistique. Ainsi la publication de l’ONU à destination des ONG, évoquée plus haut, consacre une section aux types de langages à employer selon les sessions et les interlocuteurs.

 

Hélène Nieul est diplômée de l’Institut d’Études Politiques de Paris, et du Master - recherche au Département de Science Politique de Paris I Panthéon - La Sorbonne en Relations Internationales. Au cours de ses études, elle s’est plus particulièrement intéressée à la prise de parole et à l’influence des ONG sur la scène internationale.

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