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ficha de análisis
La démocratie participative dans le XIII° arrondissement de Paris
Etude sur les formes françaises de la démocratie participative réalisée par un groupe d’étudiants de Master de l’IEP de Paris
Fecha de redacción de la ficha : 05- 06
Par BRENDEL Verena, CONFAVREUX Marine, OBLED Loïc, PFLIEGER Joachim, SEGOL Julien, VEYRENC Thomas
L’objet de cette étude consiste à explorer les formes émergentes de démocratie participative en France et à déterminer notamment s’il est possible de parler aujourd’hui d’une « démocratie participative à la française » , à côté des expériences qui ont pu être menées depuis quelques années dans des villes d’Amérique latine telles que Porto Alegre. Il s’agit ainsi d’aller à la rencontre des acteurs de cette nouvelle forme de participation citoyenne en interrogeant des personnes situées aux divers échelons de ces structures de démocratie participative.
Description de la structure
Organisation
L’organisation de la démocratie participative dans le 13ème arrondissement, bien que régie par une charte indépendante (comme dans chaque arrondissement), ne déroge pas au modèle dominant à Paris. Le territoire a été divisé en 8 conseils de quartier (ce qui, dans un arrondissement très peuplé comme le 13ème arrondissement (un peu moins de 200 000 habitants) donne une idée de la largeur de la population couverte par un seul conseil de quartier (environ 25 000 habitants). Chaque conseil de quartier est sous la responsabilité d’un élu référent.
Les conseils de quartier sont composés de trois collèges :
Le premier collège rassemble des élus
Le second collège est composé d’associations. Celles-ci ont été recensées et se sont finalement inscrites sur la base du volontariat.
Le troisième collège est composé de citoyens tirés au sort sur liste électorale et de volontaires ayant proposé leur nom et ayant été tirés au sort (en pratique, il semble que le nombre de candidats n’ait pas été assez important pour qu’un réel tirage au sort ait eu lieu).
Réalisations
Convergence avec les autre cas : les conseils de quartier dans le treizième arrondissement se sont emparés de thématiques très locales comme la propreté, l’aménagement urbain de proximité, etc. Ainsi, une commission ad hoc a-t-elle été créée au sein du conseil de quartier Patay-Masséna nommée « Vue du trottoir » , et qui anime une réflexion portant sur la somme des « petits » problèmes que chacun peut percevoir en marchant dans la rue : saleté dans certains endroits, manque d’espaces verts, de pistes cyclables, dangerosité de certaines zones du fait de la circulation… Précisons également que les habitants ont été associés à de vastes démarches d’urbanisme liées à la politique de la ville à l’occasion de la mise en place du PLU (plan local d’urbanisme), du quartier vert et de l’aménagement de la ZAC Paris Rive Gauche (voir plus bas pour un développement sur la perception des participants aux conseils de quartier). Les conseils de quartier du 13ème arrondissement ne dérogent donc pas au modèle dominant.
Particularités : le conseil de quartier Patay-Masséna a été à l’initiative d’un vœu, transmis au Conseil de Paris en 2004, ayant trait à la question du sous-emploi dans le sud-est de l’arrondissement. La réflexion de ce conseil de quartier part d’un constat : alors que le développement de la ZAC Paris Rive Gauche (bureaux, habitations, Bibliothèque, cinéma, et bientôt l’Université Paris VI et le transfert du Tribunal de Grande Instance de Paris de la Cité vers la ZAC) est fortement créatrice d’emplois, il est paradoxal que les quartiers les plus proches de la ZAC soient touchés par un véritable chômage de masse dépassant de beaucoup la moyenne nationale. Le vœu soumis au Conseil de Paris vise donc à ouvrir une antenne ANPE dans le quartier de manière à relayer efficacement les offres d’emplois et à permettre ainsi à des personnes touchées par le chômage d’obtenir des opportunités de trouver un emploi, qui en plus est près de chez elles (ce qui génère des économies en terme de garde d’enfants, de transports, etc.). Le vœu émis a été soutenu par la marie d’arrondissement.
L’explication de cette différence tiendrait selon nous à la sociologie du quartier et à la souplesse de la structure mise en place. Ainsi, il n’est pas étonnant que la population d’un quartier touché par un problème structurel important se saisisse, via un organe de proximité dont les attributions ne sont pas gravées dans le marbre, d’une question qui lui paraît essentielle.
Les différentes perceptions de la structure
Un complément à la démocratie représentative
Il n’existe pas dans le 13ème plus qu’ailleurs de volonté affichée des habitants de jouer un rôle autre que celui de complément à la démocratie représentative. Ainsi, le travail de concert avec les élus apparaît primordial, et personne, même ceux qui réclament plus d’autonomie, n’a de revendication sur un plus grand contrôle du budget municipal ou de la politique générale de la ville. La seule personne rencontrée préconisant une augmentation du budget de fonctionnement des conseils de quartier n’est autre que M. Pellissier, adjoint au maire chargé de la démocratie participative. Au contraire, on pourrait dire que les habitants semblent plutôt embarrassés qu’autre chose par le budget, qui n’est souvent utilisé que partiellement voire pas du tout.
On peut risquer une formule dans laquelle les personnes interrogées devraient se reconnaître : les conseils de quartier apparaissent comme un organe de réflexion et d’interface entre les habitants et les élus, dont l’objectif est de faire ressortir des revendications touchant au plus prêt de la vie quotidienne des citoyens et qui ne seraient pas relayées sinon.
Un rôle difficile à déterminer
Nous avons été frappés par le flou qui règne sur la mission de conseiller. Trois ans après leur prise de fonction, certains participants ne savent pas quand leur mandat prend fin, ni s’ils peuvent être reconduits et comment. Plus généralement, une réelle ombre plane sur les statuts des conseillers. Cette indétermination était patente au début de l’expérience. Qu’elles fassent partie du second ou du troisième collège, les personnes interrogées disent n’avoir eu aucune réelle information sur ce qu’on attendait d’elles (selon elles, les élus étaient également perdus) et se sont engagées sans mesurer réellement ce que cela représentait. Cette remarque n’est pas forcément négative (nous pensons que la souplesse des structures mises en place constitue leur principale force), mais explique probablement un temps de rodage important et le fort taux d’absentéisme constaté au début.
Rapport aux élus et aux citoyens
Il faut ici distinguer le sentiment des élus de celui des participants aux conseils de quartier. L’élu interrogé considère l’expérience comme une grande réussite qui a permis de rapprocher élus et citoyens et a modifié la vision des uns et des autres sur un certain nombre de questions (meilleure prise en compte des souhaits des habitants pour les élus, meilleure prise en compte des contraintes et des déterminants de l’action publique pour les citoyens). Selon Jean-François Pellissier, on peut désormais difficilement prendre une décision d’aménagement dans un quartier sans que le conseil adéquat ait été consulté sur ce sujet. Le poids de ces organes est donc maintenant certain, et accepté par les élus bien que beaucoup aient été réticents au départ.
On ne retrouve pas une vision aussi idyllique chez les participants. Premièrement, beaucoup sont dépités par l’apathie de leurs « voisins » et notent une très faible mobilisation de la population (taux de réponse aux questionnaires distribués insignifiants, faible participation aux séances plénières, etc.). Plusieurs remarquent que le rôle du comité de quartier n’a souvent pas été analysé à sa juste place par certains habitants du quartier qui ont pu y voir une antenne de la mairie ou au contraire une solution à tous les problèmes.
Les relations avec les élus sont ambivalentes. D’un point de vue personnel, elles sont bonnes, mais les participants se plaignent d’une certaine instrumentalisation de la part de la mairie, notamment pour ce qui est de la réalisation du quartier vert. En d’autres termes, les élus auraient utilisé certains travaux du conseil de quartier afin de promouvoir un projet qui aurait été entièrement conçu au niveau de la mairie sans aucune concertation.
Le risque d’instrumentalisation des conseils de quartier a d’ailleurs été souligné par M. Pellissier. Dans des conflits opposant plusieurs niveaux de décisions (par exemple le transfert du tribunal de grande instance dans le 13ème arrondissement qui a mis face à face la mairie de Paris, l’État, les Hôpitaux de Paris [l’Hôtel Dieu devant initialement abriter le TGI, ce qui a provoqué une levée de boucliers), les maries d’arrondissement, etc.), l’appui des conseils de quartier peut être un atout de poids. Les conseils de quartiers ont donc acquis une certaine importance stratégique et les participants semblent parfois ressentir cette possible instrumentalisation.
Les personnes interrogées n’estiment donc pas avoir un réel poids dans la prise de décision, contrairement au sentiment de l’élu responsable.
Par ailleurs, on peut noter une certaine incompréhension des citoyens face à la pluralité des niveaux de décision, ce qui devrait aller cependant en s’amenuisant au fur et à mesure qu’ils gagnent en expérience.
Analyse de la structure
Qui participe ? Politisation, et reconstruction des clivages
Le conseil de quartier Patay-Masséna présente la particularité que les élus de l’opposition n’y participent jamais (ce qui, même au sein de l’arrondissement, constitue une exception). Comme dans les autres cas étudiés, l’appartenance politique n’est jamais revendiquée par les participants et les débats plutôt consensuels. Il est extrêmement rare que les habitants participent aux conseils de quartier en affichant leur étiquette politique et les sujets ne sont en général pas propres à faire ressurgir les clivages partisans. Par contre, la sensibilité de gauche des personnes interrogées dans le quartier Patay-Masséna semble plus marquée que dans les autres cas, ce qui est probablement du à la composition sociologique du quartier. Selon Jean-François Pellissier, un élément important pouvant expliquer la participation et l’orientation des habitants au sein d’un conseil de quartier est la densité du tissu associatif plutôt que la sociologie propre à la zone. La présence, le quartier Patay-Masséna, d’associations ayant pour but la réinsertion, le soutien scolaire et l’aide aux familles, est un élément qui contribue selon nous à accentuer la politisation à gauche de la structure, mais qui n’est pas déterminant sur les travaux du conseil de quartier.
La question de la représentativité
A cet égard, on pourrait se demander si notre tentative de caractérisation des préférences politiques des participants n’était pas vaine dans une période où beaucoup de personnes se revendiquent en quelque sorte comme non-alignés, ou ne votent plus. Or ce n’est pas du tout le cas dans les conseils de quartier : ceux-ci sont composés de citoyens actifs et informés, qui participent activement à la vie publique. La conclusion est claire : les citoyens qui sont exclus par des facteurs socio-économiques ne participent pas aux conseils de quartier. Ceci est particulièrement frappant dans le conseil de quartier étudié, dans lequel se trouvent notamment des foyers de travailleurs migrants. Cela peut s’expliquer très simplement par le fait que premièrement les tirages au sort ont eu lieu sur la base des listes électorales et, de manière très contraignante, qu’il existe une inégalité fondamentale liée à la capacité de prendre la parole en public. On peut ici remarquer une réponse très intéressante qui nous a été faite par un membre du second collège, selon qui le rôle des associations dans les débats des comités de quartier peut consister à porter la voix de ceux qui sont traditionnellement exclus. Malgré tout, l’intégration des habitants du quartiers qui n’ont pas la nationalité française reste un échec, le conseil de quartier (sur-)représentant une population déjà intégrée au jeu démocratique traditionnel. Cela n’empêche pas le conseil de quartier de se saisir de questions sociales qui, a priori, défendent l’intérêt de tout l’arrondissement dans sa diversité et non pas d’une minorité aisée, mais constitue tout de même une véritable limite à la représentativité des structures mises en places et donc à la légitimité de leurs propositions.
Fichas :
Nous avons centré nos investigations sur le conseil Patay-Masséna, interrogé plusieurs membres du conseil de quartier issues des deuxième et troisième collèges, et avons complété cette étude par une interview de M. Jean-François Pellissier, adjoint au maire pour la démocratie participative et à ce titre coordonnateur de l’ensemble des activités des conseils de quartier sur tout l’arrondissement.