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Gouvernance, Une mutation du pouvoir ?
Autor : Philipe Moreau Defarges
Fecha de redacción de la ficha : 17-04-05
Par Maria Gonzalez Solis
« L’esprit d’une époque s’organise toujours autour de quelques mots-references,termes omniprésents et équivoques, en général utilises sans être définis.Ainsi notre époque, celle de l’après guerre froide a-t-elle son vocabulaire : mondialisation, globalisation, marche, régulation, déconstruction, partenariat, gouvernance… »
« C’est le temps des ‘ance’ : confiance, repentance, gouvernance, le lien étant la centralité d’une démarche, d’une progressivité. »
« Gouvernance, produit d’interaction sans fin, appelle le sondage, le referendum, toutes les procédures qui rapprochent, fondent dans une même dynamique gouvernants et gouvernes. Or la technique facilite cette mutation du pouvoir.les réseaux et les flux triomphent. Les sociétés deviennent d’immenses terrains de jeu aux règles mouvantes, aux équipes en recomposition permanente et aux arbitres incertains : Les Etats et les organisations internationales. »
« Voici le pouvoir politique dévalue ! ce pouvoir fixait les grandes finalités collectives.[…] Le bonheur n’est plus une idée collective.La priorité de l’individu occidental est son épanouissement personnel.Si l’Etat doit strictement respecter quelque chose c’est bien cet épanouissement personnel. »
« Y a t il transformation du pouvoir dans cet occident qui s’emble s’être affranchi de la rareté et qui paraît rejeter toute hiérarchie ? »
Trois clés généalogiques de la gouvernance
L’auteur distingue classiquement trois sortes de gouvernances qui correspondent a une évolution chronologique :
corporate governance ou gouvernance d’entreprise: prémices de gouvernance issue du secteur prive,qui insiste sur une participation des salaries a la gestion de l’entreprise.C’est un nouveau mode de management transparent et souple. Les décisions ne viennent plus d’en haut mais doivent se prendre en interaction avec toutes les parties concernees.
good governance ou bonne gouvernance: une notion née a la suite de la crise économique asiatique de 1997 ou une coopération et coordination internationale ont été nécessaires pour répondre a ce nouveau type de crise mondiales. Elle directement lie au principe anglo-saxon de accountability.
global governance ou gouvernance mondiale: notion née en 1992 dans la London school of economics (LSE) puis reprise par l’ONU en 95.
La notion de gouvernance mondiale s’inscrit dans une mutation du pouvoir étatique et des relations internationales comme on l’étudiera maintenant.
Définition et contexte de l’essor de la notion de gouvernance mondiale
« (le terme gouvernance) ne serait-il pas qu’une enieme « grande illusion » ? » , voici la question que Moreau Defarges pose comme fil directeur de son analyse sur la gouvernance mondiale. Il s’attache a savoir si ce terme a la mode recouvre vraiment une réalité ou si ce n’est qu’une coquille vide. Pour ce faire, il analyse le concept d’évolution de cette notion et son ancrage dans l’évolution des relations internationales.
Qu’est ce que la gouvernance ? un concept mouvant reflétant un processus et une transformation du pouvoir.
Ce n’est pas un hasard si notre le vocabulaire de notre époque utilise fréquemment pour décrire la réalité des mots en « ance » , « ing » en anglais. Ces termes reflètent en effet la transformation du role de l’état et des relations internationales devenue mouvants, en constante transformations (cf citation de la définition de la gouvernance comme processus d’interactions sans fin).
La rupture entre une conception classique et statique et cette nouvelle approche serait la fin de la guerre froide.En effet, la fin des antagonistes a dérobe a l’état une de ses caractéristiques essentielles et une de ses raisons d’être, a savoir la protection conte l’ennemi. Aujourd’hui l’occident ne craint plus d’envahisseur .
La gouvernance globale est le produit d’un consensus global pour le maintien de la paix et englobe toutes les actions par lesquelles les individus, institution et structures publiques ou privées gèrent leurs affaires communes dans la plus grande transparence. Celle ci implique un monde idéologiquement réconcilie explique Moreau Defarges en nous renvoyant a la thèse de la fin de l’histoire de Fukuyama.
Gouvernance comme mutation du pouvoir de l’Etat
Ainsi la gouvernance,sorte de « stade ultime tant du communisme que de la démocratie » , confirme la dévaluation du politique qui ne porte plus les rêves de l’humanité mais doit se borner de permettre l’épanouissement personnel de chacun. Dans un monde régi parla gouvernance, le pouvoir doit a la fois surveiller le bon fonctionnement des institutions et le respect des droits individuels mais se trouve aussi strictement contrôle par des instance gouvernementales , non gouvernementales, financières, écologiques, humanitaires, sanitaires, etc…a cet égard, l’état perd son statut particulier et la politique se voit confondue avec la technique, l’état avec l’entreprise qui en fin de compte se trouve être la responsable du bien commun. L’entreprise se politise mais aussi tous les autres acteurs.Alors se cristallise la notion de gouvernance participative (stakeholder governance).
Gouverner n’est plus le monopole de L’état qui voit s’effacer une a une ses raisons d’être, c est une fonction qui appartient a toute la collectivité.Tous sont responsable des tous . Cette dissolution du politique et magnifiquement illustre par la phrase de MD : « Tout est politique et donc rien n est politique, a moins que ce ne soit l’inverse. »
Toutes ces transformations soulèvent empiriquement une question de bon sens et pourtant essentielle dans l’analyse de ce processus : « Mais enfin, qui commande ? »
Et surtout aussi se pose la question de savoir comment une telle transformation a pu avoir lieu.
trois facteurs qui soutiennent l’essor gouvernance et la transformation du pouvoir
Moreau Defarges part du principe selon lequel l’essor de la gouvernance conçue comme rupture de hiérarchies et processus d’interactions multiples a été rendu possible par trois facteurs caractéristiques de nos sociétés occidentales , a savoir :
la fin de la guerre froide et les antagonismes (comme vu précédemment)
une démocratisation generalisee qui ouvre la voie a la participation politique pour tous
surtout un enrichissement personnel qui a permis l’essor de l ; individualisme et des identités autres que celles reconnues dans le cadre étatique. Désormais le citoyen peut (seulement ? ) penser a son épanouissement personnel.
En conséquence, le rôle de l’Etat en est modifie car confronte a des comparaisons et exigences croissantes. L’utilisation arbitraire de la force est désormais impossible et les antagonismes de la guerre froide ne légitime plus l’état a agir sans consultation citoyenne.
Révolution technique
Par ailleurs, c’est grâce a la révolution technique (surtout internet) que la gestion de la gouvernance est rendue possible. Cette révolution technique a en effet donne naissance a celle qui constitue désormais l’unité de base de la gouvernance : les réseaux, et leur mode d’action : les flux.
Gouvernance,une grande illusion ?
Il faut être conscient que noter analyse de la gouvernance mondiale et l’optimisme souvent présent sont ossus d’un milieu occidental privilégie non représentatif de la réalité globale. La croissance économique n’est pas omniprésente et les évidences manichéistes occidentales ne sont pas exportables (par exemple le principe démocratique ou le respect des droits de l’homme). Cette base condescendante envers tout ce qui n’est pas occidental ne rend pas possible un véritable dialogue ni consensus nécessaire a une gouvernance mondiale digne de ce nom.
Par ailleurs, les inégalités et oppositions persistantes dans le monde se trouvent masquées par une interprétation occidentale de gouvernance. Les clivages politiques ou miliaires ont certes disparu ou du moins ont été fortement atténues en occident après la guerre froide mais ce n’est pas le cas ailleurs ou même la notion de gouvernement sur le plan national pose problème.
De plus, force est de constater que nature du pouvoir reste inchangé et l’Etat continue a être l’unité de référence dans les relations internationales.c’est le seul a avoir une représentativité et marge d’action viables bien que imparfaites. « la gouvernance, si elle gomme les brutalités du pouvoir, ne le change probablement pas fondamentalement » .
En fait, on peut dire que la gouvernance survit grâce et contre les Etats par la seule volonté de garantir la paix et n’est en aucun cas la preuve d’une unité ou une harmonie internationale.
Gouvernance, Une mutation du pouvoir~?
Le Débat, n° 115, mai-août 2001, p. 165-172
Philippe Moreau Defarges est ministre plénipotentiaire, chercheur à l’Institut français des relations internationales et co-directeur du Ramses (IFRI), professeur à l’Institut d’études politiques de Paris et chargé de séminaire (gouvernance globale) en DEA de relations internationales à l’université Panthéon-Assas (Paris II).