note de lecture
Gouvernance globale contre régulation citoyenne internationale
Auteur : Thierry BRUGVIN
Date de la note : 12-04-05
Par Maria Gonzalez Solis
« La société civile correspond à un ensemble, compose de tellement de sous-groupes que son usage entraîne inévitablement des confusions volontaires ou non. L’utilisation de ce concept, par les dirigeants libéraux, dans le cadre de la théorie de la gouvernance mondiale, est alors propice à une orientation partisane, mais masquée a l’opinion publique »
« Très habilement les partisans du néo libéralisme s’appuient sur les réprobations actuelles contre l’état et les institutions interétatiques pour en renforcer la dénonciation et appeler à son affaiblissement au profit de celui de la société civile »
« La régulation internationale doit passer à travers une régulation conjointe du politique par les citoyens.La régulation conjointe est le fruit de conflits aboutissant à un compromis entre la régulation autonome et la régulation de contrôle.Celle-ci permet de développer la participation au processus de décision au niveau le plus bas (subsidiarité nécessaire a la démocratie) puis lorsqu’un désaccord survient de trancher grâce au pouvoir de contrôle par les pouvoirs publics »
GOUVERNANCE GLOBALE CONTRE
REGULATION CITOYENNE INTERNATIONALE
Thierry BRUGVIN
Questions :
Comment définir la société civile ? il y a-il une définition en soi de cette notion ou bien n ‘est –elle qu’un concept vide instrumentalise par une idéologie politique libérale ?
Comment construire en véritable régulation internationale ?
Historique et définition de la notion de société civile
Tout d’abord, l’auteur commence par remarquer la grande variété dans l interprétation et dans la composition de cette société civile internationale qui serait un concept souvent volontairement vague et très floue, une sorte de « fourre-tout » dont on ne connaît pas les limites précises et que les gouvernements libéraux utilisent quand bon leur semble.
Si l’heterogeneite de la société civile n est pas un argument très original, Thierry Brugvin propose une analyse particulière de typologie de ses acteurs ainsi qu ‘une remise en contact de l’essor de ce concept en parallèle avec celui de la gouvernance mondiale en fonction de l’évolution conte des relations internationales.C’est particulièrement l’articulation dans l’essor et l’évolution entre les notions de société civile internationale et celle de gouvernance mondiale et marque l’analyse de Brugvin.Ceci est d’autant plus valable qu’il ne s’appuie pas seulement sur ses propres réflexions mais présente les conclusions d’auteurs divers comme Pascal Lamy, Rosenau, Smouts, Brown et beaucoup d’autres.
L’auteur explique ainsi comment c est avec l’émergence des ONG et de la contestation d’une mondialisation libérale que le concept de société civile revient sur le devant de la scène pour essayer de proposer un modèle alternatif de régulation internationale.Concrètement, des organisations comme l’OMC ou la banque mondiale ont compris l’enjeu qui était en cause : un regain de légitimité nécessaire et répondant a la requête de nouveaux intermédiaires sociaux qui ne trouvent réponse en aucun autre lieu.En effet seule la société civile peut « unir la multitude » tel le Léviathan qui sinon se transformerait en « hydre a 100 têtes »
De même, la théorie de gouvernance mondiale s’appuie sur la société civile pour principalement diminuer ou bien augmenter le ou plutôt façonner rôle de l’Etat dans ne conception ou les individus ne sont pas des citoyens mais de simples vecteurs d’inserts particuliers.
Mise en garde contre une manipulation par le politique à travers des discours ambigus
Cette réflexion s inscrirait donc en fait dans une idéologie néolibérale qui conçoit l’Etat comme un obstacle aux libertés des acteurs économiques d’où un risque de trop fort affaiblissement de L’Etat, perte de garanties sociales et manque de régulation…
D’où de nombreuses ambiguïtés conceptuelles dans les discours politiques quant a la définition de société civile internationale souvent utilisée comme prétexte sans que personne ne sache très bien ce qu elle regroupe.Or il est bien clair que quand un gouvernement dit tenir en compte la société civile dans sa prise de décision, il pense surtout aux secteurs de l’économie (ex : Qatar 2001, seulement un tiers de représentant de la société civile était des ONG et syndicats, le reste étant des associations représentant les intérêts des FMN)
Le jeu sur l’ambiguïté est facilité par le fait que se multiplient les associations aux objectifs divers et aux intérêts très differents…
Différencier les acteurs de la société civile pour réussir à l’intégrer
Il faut tout abord faire une claire distinction entre acteurs publics et prives ce qui s’illustre par une recherche de l’intérêt général pour les premiers contrairement aux autres.Il faut aussi tenir compte de la différence entre les mouvements citoyens sociaux ou pas, transnationaux ou pas, bilatéraux ou multilatéraux.Il n e faut pas non plus confondre les ONG puis ceux que les anglo-saxons définissent comme les BINGOS (business International Non Govermental Organisations), différentes encore des Organisations Internationales Publiques.
Or la société civile compte souvent avec des acteurs mixtes, ce qui pose un problème de pondération dans la prise en compte de leurs intérêts.Quel rôle accorder en effet a les associations ou ONG qui financées par les pouvoirs publics acquièrent un statut parapublic ? a l ; inverse, quelle crédibilité donner a les organisation publiques ou gouvernements qui censés servir l’intérêt général bénéficient essentiellement les intérêts prives ?
Pour réussir a saisir la dynamique de la société civile faut en fait sortir d une logique a la Montesquieu de confrontation des pouvoir ou les pouvoir doit arrêter le pouvoir et s inscrire dans un processus constructif triangulaire compose par la société civile d une part, Les forces démarche d une autre et enfin L’état. Cette interaction ne saurait se faire sans inclure un des trois acteurs. Comment assurer cet équilibre ?
Vers une régulation conjointe du politique par les citoyens.
L’auteur part du principe qu’aussi divers soient ils, la majorité des mouvements sociaux ne souhaitent pas une régulation de la politique internationale dominée pas les acteurs économiques (« la gouvernance des libéraux » )
Brugvin propose une solution originelle fondée sur une réflexion de Reynaud sur une régulation conjointe ou il insiste plus sur la participation citoyenne. La régulation conjointe étant celle qui « correspond a la création et la transformation des règles et par conséquent soit a la décision de créer une règle soit a la décision d’appliquer une règle .La régulation conjointe est le fruit de conflits aboutissant a un compromis entre la régulation autonome et la régulation de contrôle. Celle ci permet de développer la participation au processus de décision au niveau le plus bas (subsidiarité nécessaire a la démocratie) puis lorsqu’un désaccord survient,de trancher grâce au pouvoir de contrôle parles pouvoirs publics »
Dans le cas d’une régulation internationale, cela permet un arbitrage par les pouvoirs publics, sans elle, la régulation par la seule société civile risque de ne posséder ni la légitimité démocratique ni la capacité a préserver l’intérêt général.
Le rôle de l’état est donc essentiel dans cet équilibre entre société civile et forces du marche dans une régulation conjointe qui tout en conservant une certaine autonomie de ces trois composantes effectue un contrôle conjoint en vue de l intérêt général . dans cette approche c est aussi le principe de subsidiarité qui s esquisse avec l’idée que chaque acteur doit agir là où il est le plus efficace et si un désaccord survient c est aux pouvoirs publics de trancher.
Notes :
Commentaires
Apport intéressant sur régulation conjointe qui réconcilie L’état la société civile et les forces du marche.
Brugvin affiche une claire prise de position antilibérale, caractéristique d’une approche française ? cette prise de position ce qui peut-être a la fois une force et un point de critique dans son article.
Quelques remarques methodologiques :
Pas de définition claire société civile comme unité autonome, l’auteur énumère différentes composantes et tendances sans pour autant réussir a en dégager sa spécificité.
Thèmes non traites :
Quid du rôle ONU ? des medias ? on pourrait aussi opposer l’argument inverse d’une manipulation du politique par société civile et opinion internationale.
Colloque "Les mobilisations altermondialistes" 3-5 deĢcembre 2003
ou voir www.afsp.msh-paris.fr/activite/ groupe/germm/collgermm03txt/germm03brugvin.pdf
Thierry BRUGVIN est co-fondateur et ancien président d’Attac Besançon et membre du CA national d’Attac.
Il est aussi sociologue au EHESS et travaille au CRESP (Centre de recherche sur les enjeux en santé publique).